mercredi 25 février 2015

En attendant Godot, S. Beckett

En attendant Godot, de Samuel Beckett

ESTRAGON. – […] Allons-nous en.
VLADIMIR. – On ne peut pas.
ESTRAGON. – Pourquoi?
VLADIMIR. – On attend Godot.1



Résumé de la pièce


     Deux curieux personnages à l’allure de clochards, Vladimir et Estragon, se rencontrent dans un lieu imprécis, au pied d’un arbre squelettique. Leur but : attendre Godot, un énigmatique personnage dont on se saura jamais rien. Ils ne savent pas quand il viendra, ni même s’il viendra vraiment. Ils ignorent si l’arbre sous lequel ils attendent est le bon, si le jour est celui du rendez-vous. Ils sont simplement convaincus qu’ils doivent attendre. Pour passer le temps, ils dialoguent sans but précis. Faisant diversion dans cette attente intolérable, un couple survient : Pozzo et Lucky. Ce dernier, harnaché au cou, porte les bagages de l’autre, qui le conduit au fouet. Après leur départ, le temps passe toujours, jusqu’à ce qu’un jeune garçon vienne annoncer à Vladimir et Estragon que Godot ne viendra pas. Les deux compagnons décident de se séparer et de partir, mais ils ne bougent pas. Fin du premier acte. Le deuxième acte reproduira essentiellement le même schéma.

     C’est entre le 9 octobre 1948 et le 29 janvier 19492, donc assez rapidement, que Samuel Beckett a rédigé En attendant Godot. Après avoir été longtemps répétée, après plusieurs refus, la pièce est représentée pour la première fois le 3 janvier 1953. Roger Blin en assure la mise en scène au petit Théâtre de Babylone. C’est d’abord un succès de scandale. Applaudie par une classe intellectuelle avide de nouveauté, condamnée par un public parisien qui n’y comprend rien, la pièce suscite des passions contradictoires. Mais peu importe ce qu’on en dit, Beckett est devenu célèbre. Depuis, la pièce a été acclamée dans le monde entier et traduite dans une vingtaine de langues.

     En attendant Godot est une pièce sur la vacuité, le vide de l’existence, l’absurdité de la condition humaine. Attendre Godot, c’est espérer que le monde va changer tout en étant conscient que cet espoir est ridicule.









Qui est Godot ?

     Beckett a toujours refusé les interprétations de ses œuvres. Et pourtant, s’il est une œuvre qui a subi les analyses de toutes sortes, parfois abusives, c’est bien En attendant Godot. On a prêté bien des visages à Godot, personnage absent mais central. Toute l’action dramatique est construite autour de lui. Quelques indices dans le texte nous le présentent comme un homme d’affaires, qui a une famille, un cheval, un compte en banque, une barbe blanche. Il crie et semble brutal : il bat le frère du jeune garçon qui apparaît à la fin des deux actes. On a souvent associé Godot à Dieu. Le nom même serait une dérivation de l’anglais God. Comme Dieu, Godot est mystérieux, caché, inaccessible. De plus, dans le texte, on fait souvent allusion à la religion. Selon l’interprétation théologique, la pièce serait à lire comme la tragédie d’une humanité déchue qui attend désespérément la venue d’un Sauveur. Et seul le rétablissement d’un lien avec la divinité peut donner un sens à la vie de l’homme. C’est ce qu’espèrent Vladimir et Estragon.
     Même s’il est vrai que la figure de Dieu peut être suscitée par le texte, cette interprétation demeure réductrice. D’ailleurs, Beckett a toujours nié cette association quand on le questionnait sur le sens de l’oeuvre : «si Godot était Dieu, je l’aurais appelé par ce nom »3. Dans les faits, il ne faut voir en Godot qu’une figure imaginaire qui symbolise tout ce qui pourrait venir donner un sens à une existence absurde. Bref, Godot incarne ce que chacun attend et qui ne vient jamais. Savoir qui est Godot précisément n’est d’ailleurs pas ce qui importe dans cette œuvre. Beckett lui-même semble n’en avoir aucune idée : « Si je savais qui était Godot, je l’aurais dit dans la pièce »4 C’est l’effet de l’absence de Godot qui doit retenir l’attention beaucoup plus que son identité.


La condition humaine


     Rappelons-nous que la pièce a été écrite à la fin des années 1940, au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, en Europe. Le monde est détraqué. L’humanité est désabusée, a perdu ses repères. On cherche un sens à l’existence. C’est donc le tragique de la condition humaine que représente En attendant Godot.
     Beckett place le spectateur face à lui-même, au vide de son existence, au néant. Comme Vladimir et Estragon, l’être humain attend une délivrance, cherche un sens à la vie. Mais en attendant il souffre, passe le temps en conversations creuses, il joue. Son quotidien est traversé de rencontres et de divertissements insatisfaisants. Le rire et l’humour sont importants dans le texte de Beckett. La condition humaine est ici tournée en dérision. Ce rire de la dérision permet de supporter la désespérance de l’homme qui attend un quelconque événement donnant sens à son existence. Mais c’est aussi un rire amer qui met en relief l’écart entre ce que l’homme espérait obtenir de la vie et ce qu’il en obtient, entre ses rêves et la réalité.
     Dans ce contexte, Godot devient « celui qui répond à l’absence de communication, il serait le bonheur de vivre, l’espoir, le désir, l’amitié, la fin de la solitude, la possible rédemption de nos péchés, la possibilité de calmer nos angoisses face à la finitude »5


Parler pour ne rien dire

    La parole dans En attendant Godot n’est là que pour combler le vide. Vladimir et Estragon, confrontés au néant, parlent pour se donner l’impression d’exister. Ils n’ont rien d’autre à faire que dialoguer, même si ce dialogue ne les mène nulle part. Le silence devient alors une menace, puisqu’il rappelle le néant. Il faut donc à tout prix l’éviter, peu importe ce qu’on dit :

Long silence
VLADIMIR. – Dis quelque chose!
ESTRAGON. – Je cherche
Long silence
VLADIMIR (angoissé). – Dis n’importe quoi !6

Même si parler est devenu la préoccupation essentielle des personnages, il y a absence de réelle communication. Les protagonistes semblent souvent indifférents aux propos de l’autre. C’est comme si on était en présence de deux solitudes qui vivent dans des univers parallèles. Les nombreuses didascalies qui ponctuent les courtes répliques par des silences et des temps accentuent la distance dans les échanges. D’ailleurs, le silence est aussi important que la parole dans l’écriture de Beckett. Il en est de même des malentendus, de l’ambiguïté de certains propos. Cette incommunicabilité pose une question troublante : « […] si l’échange entre les individus ne sert qu’à combler le vide existentiel, à quoi peut bien servir l’existence elle-même? Plus essentiellement, à quoi peut donc bien servir la compagnie d’autrui? »7


Une histoire de couples


     En attendant Godot est une pièce de couples. Les rapports qui unissent les personnages sont plus importants que les caractères individuels. Les deux duos de la pièce, par l’interdépendance qui les définit, rappellent des tandems célèbres, comme Don Quichotte et Sancho Pança, Sganarelle et Don Juan. Ils ont aussi les caractéristiques des duos de clowns comiques. D’ailleurs, les chutes, les fuites, les maladresses, les objets ridicules appartiennent à l’art clownesque. Les personnages eux-mêmes se jouent la comédie pour passer le temps :

VLADIMIR. – On pourrait jouer à Pozzo et Lucky.
ESTRAGON. – Connais pas.
VLADIMIR. – Moi je ferai Lucky, toi tu feras Pozzo. […]8

    Vladimir est le moteur du premier tandem. Il est l’élément dynamique, optimiste, discipliné. Il a les idées, il a une culture (biblique notamment). Estragon est plutôt l’homme de l’instinct, du doute, du désespoir. Il est le pessimiste, le passif, l’impulsif. Il mange, il dort, il a mal aux pieds. Il pense au suicide pour essayer d’en finir. Ce qui caractérise leur relation, c’est qu’ils sont inséparables tout en manifestant le désir de se séparer. Mais la nécessité de rester ensemble dans un monde en déchéance l’emporte. Sans la présence de l’autre, la vie perd toute signification :

ESTRAGON. – On se débrouille pas trop mal, hein, Didi, tous les deux ensemble?
VLADIMIR. – Mais oui, mais oui. Allez, on va essayer la gauche d’abord [la chaussure gauche].
ESTRAGON. – On trouve toujours quelque chose, hein Didi, pour nous donner l’impression d’exister. 9

   Un deuxième duo vient en quelque sorte « divertir » Didi et Gogo dans leur attente interminable. Le couple Pozzo-Lucky repose sur la domination et la violence. Les deux personnages entretiennent une relation maître-esclave, dominant-dominé, à la limite sado-maso. Pozzo est le maître, content de lui, vaniteux, cruel. Mais au fond c’est un misérable, cardiaque, puis aveugle et impotent dans le deuxième acte. Lucky est le serviteur soumis, le porteur pitoyable. Il obéit et souffre en silence, mais est satisfait de sa condition. Il est « chanceux » (en anglais « lucky ») puisque, contrairement aux autres, il n’a pas à chercher comment passer le temps : Pozzo lui dit quoi faire et il le fait. Il n’espère plus rien. La cruauté qui caractérise la relation entre Pozzo et Lucky leur rappelle qu’ils existent. La dépendance est donc réciproque : le bourreau a besoin de sa victime et vice versa. On a souvent dit que le duo symbolisait les rapports de domination dans un monde déchu, où violence et dépendance se marient facilement. Ou encore le cruel destin de l’homme, déchiré entre la raison et la volonté, l’instinct et la pensée.


Un dénuement matériel

     « Route à la campagne, avec arbre. Soir. » Ce sont les indications que Beckett donne au début du texte pour situer la scène. Donc un espace très peu défini, un temps indéterminé. Aucun repère géographique, politique, historique. Beckett propose délibérément un univers dépouillé pour représenter l’absence, le vide, le néant, encore une fois. Ce vide scénique est d’ailleurs angoissant pour Vladimir et Estragon, qui ne savent jamais s’ils sont au bon endroit pour rencontrer Godot. Sans référence spatiale, les personnages sont condamnés à l’errance. L’espace se réduit à un point fixe : l’arbre, le lieu du rendez-vous. Cet arbre est rabougri, dénudé au premier acte. Mais deux ou trois feuilles apparaissent au deuxième acte. Le temps s’est-il écoulé entre les deux rendez-vous? Y a-t-il eu un changement de saison? Ces feuilles sont-elles un signe d’espoir? Ou signifient-elles tout simplement le recommencement éternel de la vie? C’est peut-être un peu tout ça à la fois. Mais ne comptons pas sur Beckett pour nous répondre!


Une structure géométrique

     Malgré une anarchie apparente dans le propos, la pièce est construite avec une rigueur peu commune. Sa structure est à la fois répétitive et circulaire. On parlera de circularité dans la mesure où la fin des deux actes, donc la fin de la pièce elle-même, semble nous ramener au commencement. On imagine aisément la même scène se reproduisant jour après jour. L’impossibilité de se sortir de l’attente, du néant se manifeste donc dans la structure même de la pièce. Les deux actes suivent un plan quasi identique : retrouvailles de Vladimir et Estragon, venue de Pozzo et Lucky, message final du garçon et décision de partir. Un système de répétitions internes de phrases, de thèmes, de situations vient renforcer cette structure. Toutefois, le deuxième acte présente quelques éléments nouveaux : quelques feuilles apparaissent dans l’arbre, le tandem Pozzo et Lucky est passablement transformé. La répétition dans la structure n’est donc pas un retour absolu à la case départ. Mais il demeure que le dénouement conventionnel du texte dramatique classique est désamorcé. De cette manière, on devine que Beckett rompt avec la dramaturgie qui le précédait.

VLADIMIR. – Alors, on y va?
ESTRAGON. – Allons-y.
Ils ne bougent pas.

RIDEAU10







SAMUEL BECKETT


Le succès ou l’échec, au niveau du public, n’ont jamais eu beaucoup d’importance pour moi; en fait, c’est dans l’échec que je me sens le plus à l’aise, ayant respiré profondément son air vivifiant au cours de toute ma vie d’attente, jusqu’à ces dernières années… 11
Samuel Beckett (11 janvier 1956)

      Samuel Beckett est né le Vendredi saint 13 avril 1906 dans une banlieue de Dublin, dans une famille protestante très austère et relativement aisée. Il reçoit une éducation normale, d’abord à l’Earlsfort House School, un externat pour garçons, puis à l’âge de 13 ans à la Portora Royal School en Irlande du Nord. Dans cette école disciplinée et sévère, il se distingue surtout dans les sports. On lui prédit une carrière de haut fonctionnaire, d’homme politique ou d’homme d’affaires. À cette époque, on disait déjà de lui qu’il était « replié sur lui-même et parfois lunatique; mais il avait un sens aigu du ridicule […] »12
      De 1923 à 1927, il fait des études en français, en italien et en anglais au Trinity College. Il commence alors à fréquenter les milieux artistiques et littéraires où il se fait connaître. Il va au théâtre, se fascine pour Pirandello, lit Dante et se laisse impressionner par les films de Chaplin, de Laurel et Hardy et des Marx Brothers. Il amorce son premier long séjour en France en 1928. Pendant deux ans, il sera lecteur d’anglais à l’École normale supérieure de Paris. Il fait la connaissance de James Joyce, grand romancier irlandais, auteur de Ulysse, pour qui il a une grande admiration. Il assiste Joyce dans ses travaux de diverses façons. Durant cette période, il compose Whoroscope, un poème qui sera sa première œuvre à être éditée.
      Il retourne en Irlande en 1930 où il assume la fonction de professeur assistant au Trinity College. L’année suivante, il publie un important essai sur Proust, auteur français de À la recherche du temps perdu. Il retourne à Paris en 1932. La mort de son père le ramène dans sa patrie natale en 1933. Puis il fait un séjour à Londres avant de voyager en Europe, notamment en Allemagne où il développe une antipathie pour les nazis. L’Allemagne de l’époque le démoralise. Pendant ces années, il publie quelques essais, poèmes, nouvelles qui ne connaîtront pas un grand succès. Il travaille aussi à son premier roman : Murphy. Il mène une existence de bohème, ennuis de santé et difficultés financières font partie de son quotidien. Il envisage la possibilité de changer de carrière :

« Je crois que mon prochain dada, ça sera l’aviation. […] Je n’ai pas envie de passer le restant de mes jours à écrire des livres que personne ne lira. » 13

      En 1937, il s’installe définitivement à Paris. Au début de l’année suivante, survient un événement malheureux : il est poignardé sur la rue par un proxénète. Ayant appris la nouvelle dans les journaux, Suzanne Deschevaux-Dumesnil, une amie qu’il avait connue à l’École Normale, vient lui rendre visite à l’hôpital où il est soigné. Elle ne quittera plus Samuel Beckett. C’est d’ailleurs elle qui agira comme agente littéraire pour son compagnon de vie. Après sa guérison, Beckett ira rencontrer son
agresseur en prison pour lui demander pourquoi il l’a poignardé. Celui-ci répondra tout bonnement : « Je ne sais pas, Monsieur ». On pourra reconnaître cette réplique dans nombre de ses pièces.
Peu de temps après son agression, Murphy est enfin publié, mais ne rencontre aucun succès public. Puis la guerre éclate. Il est en visite auprès de sa mère en Irlande, mais il « préfère la France en guerre à l’Irlande en paix ». Il rejoint donc la France et s’engage dans un réseau de résistance non pour des raisons politiques – toute sa vie Beckett aura eu un comportement apolitique – mais parce qu’il était indigné par le traitement que les nazis infligeaient aux Juifs et aux Français :

« Je combattais contre les Allemands qui faisaient de la vie un enfer pour mes amis; je ne combattais pas pour la nation française. »14

      Après avoir échappé de justesse à une arrestation, il se réfugie en zone libre, dans une ferme du Roussillon en Vaucluse (dans le sud-ouest de la France). Il y travaille comme ouvrier agricole et rédige son dernier roman en langue anglaise : Watt. Publié en 1942, ce roman fait apparaître pour la première fois un personnage de clochard. Plus tard, en 1946, dans Mercier et Camier, on verra le premier couple d’errants. Les éléments pour l’écriture de En attendant Godot sont en place.
À la fin de la guerre, Beckett retourne à Paris. Entre 1946 et 1948, il vit dans des conditions matérielles précaires, mais il entre dans une importante phase de créativité qu’il nomme « le siège dans la chambre ». Il prend également un virage linguistique : il décide d’écrire en français. Désormais, il traduira ses propres œuvres et n’écrira que très rarement ses manuscrits dans sa langue maternelle. Durant cette période, il écrit trois nouvelles, trois romans et ses deux premières pièces dont En attendant Godot, entre octobre 1948 et janvier 1949.
« Je me suis mis à écrire des pièces pour me sortir de la dépression noire où me plongeait le roman. Ma vie à cette époque était trop éprouvante, trop affreuse; je pensais que le théâtre ferait diversion. »15
      C’est Suzanne qui se charge de trouver les maisons d’édition pour ses romans et les théâtres pour ses pièces. Beckett, lui, termine l’écriture de L’innommable qui, avec Molloy et Malone meurt, complète une trilogie romanesque dans laquelle se trouvent l’essentiel des thèmes apparaissant dans En attendant Godot. En effet, les personnages sont réduits à leur plus simple expression et en quête d’une signification de l’existence. Et le tout est abordé avec le rire.
     En 1953, En attendant Godot est représenté devant le public de Paris. Samuel Beckett devient un auteur célèbre et reconnu. Quatre ans plus tard, son succès est confirmé avec Fin de partie et ne sera plus jamais démenti. À partir de 1956, il opère un retour à l’anglais, dans lequel il publiera la plupart de ses nouvelle pièces : Krapp’s last tape (La Dernière Bande, 1958), Happy Days (Oh ! les beaux jours, 1960), Come and go (Va-et-vient, 1965). Par contre, il continue d’écrire des récits et des romans en français.
    Beckett s’est aussi illustré à la radio, à la télévision, au cinéma. Il a écrit des pièces radiophoniques, une œuvre télévisuelle et, en 1964, un scénario pour le cinéma, Film, dont le rôle principal était interprété par Buster Keaton. En 1969, Beckett se voit décerner le prix Nobel de littérature pour l’ensemble de son œuvre. Mais il refuse de se rendre à Stockholm pour le recevoir. Par la suite, ses textes se feront de plus en plus rares et de plus en plus courts. Il vit en réclusion les dernières années de sa vie. Suzanne meurt le 17 juillet 1989. Il la suivra quelques mois plus tard, le 22 décembre 1989.
      Toute sa vie il aura eu en horreur que l’on s’intéresse à sa personne. De cet exilé volontaire, ayant connu la précarité matérielle et physique une bonne partie de son existence, de ce tourmenté, il ne faudrait retenir que son travail. Il considère que sa vie est terne et sans intérêt. Pour lui, « l’oeuvre seule importe », comme il n’a cessé de le répéter :

« Autrement, je n’aurais pas pu. Continuer, je veux dire. Je n’aurais pu traverser cet affreux et lamentable gâchis qu’est la vie sans laisser une tache sur le silence. »16

1 Samuel Beckett, En attendant Godot, Paris, Les Éditions de Minuit, 1952, p. 16.
2 Dates apparaissant sur le manuscrit original.
3 Citation de Samuel Beckett tirée de Deirdre Bair, Samuel Beckett. Fayard, 1979, p. 348.
4 Ibid, p.348.
5 Jean-Philippe Miraux, En attendant Godot, Paris, Bordas, collection L’œuvre au clair, 2004, p.54.
6 Samuel Beckett, op. cit., p. 88.
7 Jean-Philippe Miraux, op. cit., p. 72.
8 Samuel Beckett, op. cit., p. 102.
9 Samuel Beckett, op. cit., p. 97.
10 Samuel Beckett, op. cit., p. 134.
11 Extrait d’une correspondance avec Alan Schneider, metteur en scène new-yorkais, reproduit dans : Pierre Mélèse, Beckett, Paris, Éditions Seghers, collection Théâtre de tous les temps, 1966, p. 141.
12 Propos d’un ancien camarade de dortoir, reproduit dans Deirdre Bair, op. cit., p. 40.
13 Extrait d’un lettre à Thomas McGreevy, 13 mai 1933, reproduite dans Deirdre Bair, op. cit., p. 218.
14 Cité dans Deirdre Bair, op. cit., p. 282.
15 Commentaire de Beckett en 1972, cité dans Deirdre Bair, op. cit., p. 282.
16 Commentaire de Beckett, cité dans Deirdre Bair, op. cit., p. 569.